Il se feuillette et se picore, il peut être lu à rebours, il interpelle, distrait, fait sourire, donne à réfléchir… joli livre auto édité par deux auteurs strasbourgeois. L’un aime ciseler les mots, l’autre photographie le monde autour de lui. Une alchimie s’est créée entre eux et le résultat est un livre dard qui pique les consciences.
Il aime les jeux de mots et en fait l’en jeu de ses textes poétiques. Certains font penser par leur brièveté à des haïkus et appellent à l’imaginaire du lecteur. Ce recueil littéraire n’est pas un coup d’essai. Louis Schalck a plusieurs romans à son actif. Il écrit depuis 2007. Ses deux derniers romans, publiés chez L’Harmattan, Territoires amoureux en 2010 et Éternel Oubli en 2012, cachaient déjà une vision assez noire du monde sous un prétexte romanesque. Car Louis Schalck ne navigue pas dans une sphère de bobos-intellos éthérés. Il se coltine à la réalité sociale, âpre et brute, en tant que directeur du CSC de Hautepierre Le Galet. Il est également l’auteur d’articles et ouvrages professionnels dans le domaine social et il enseigne ponctuellement à l’Université de Haute Alsace. Il y a des gardiens de nuit, lui, écrit la nuit, gardien de sa conscience éveillée du monde. Pourtant, point de lourdeurs dans ses textes. Louis Schalck n’est pas un donneur de leçon. Il évoque des bribes de son enfance et des souvenirs d’ado, des réflexions politiques en quelques vers qui ouvrent sur des pans de l’Histoire – murs de Belin, Jérusalem, Ramallah, muraille de Chine... Il est un homme de son temps qui a grandi et muri avec son temps, et les Strasbourgeois se souviennent comme lui de ce printemps 2009.
Mur anti-émeutes
C’était à l’adolescence,
Quand on croit à la toute puissance de la rue,
Celle des manifestations, et des revendications,
Où l’on croise le regard de policiers casqués.
C’était à l’âge mûr,
Au mois d’avril, lors d’un rassemblement de l’OTAN,
Quand toute la ville était barricadée.
En avril ne te découvre pas d’un fil,
Partout des murs anti-émeutes
Qui ne m’émeuvent plus du tout !
Livre constat mais néanmoins sensible dont les textes ont trouvé écho avec la sensibilité de l’objectif de Jean-Louis Hess à qui les Strasbourgeois doivent la fondation du collectif Chambre à part dont la galerie expose des photographies d’artistes locaux mais aussi de pointure internationale. Les deux artistes se sont rencontrés, alors que Louis Shalck avait déjà écrit son recueil de poèmes. La coïncidence a voulu que Jean-Louis Hess eût dans ses cartons des centaines de photos de murs. Ainsi s’est constitué Murs Sauvages. Du fait que les photos n’ont pas été réalisées exprès pour les poèmes et qu’elles n’ont pas toujours un lien direct avec le texte, elles existent en tant que telles. Les mots et les photos se complètent, dialoguent en un tout cohérent pour embarquer le lecteur dans une ballade hors les murs sur le chemin de la liberté.