Critiques de films

Image du film La petite chambre
La petite chambre © KMBO
La petite chambre
un film de Stéphanie Chuat et Véronique Reymond

Elles sont comédiennes et amies depuis qu’elles ont 14 ans. Le théâtre les a réunies et elles ne se sont plus quittées, mettant en scène leurs propres spectacles comme Lignes de faille adapté du roman de Nancy Huston. Elles écrivent à quatre mains, dans l’échange, avec un sens du dialogue aiguisé. La petite chambre a suscité 10 mn de standing ovation après sa projection au Festival de Locarno.

Dire qu’il s’agit de la rencontre entre un vieillard cardiaque et une femme qui n’a pas fait le deuil de son enfant mort né, voilà qui ne donne pas très envie d’aller voir ce film. Et pourtant, ce film fera parler de lui… Emotion intacte servie par de grands comédiens ! Michel Bouquet qui refuse désormais de tourner au cinéma - son dernier rôle du roi se meurt remonte à 2006 - a craqué à la lecture du scénario et il a nourri son personnage de son acuité, de son intelligence, des éclairs de son regard malicieux. Quant à Florence Loiret Caille, elle a vraiment du talent et une personnalité de comédienne à part.

Il est Edmond, elle est Rose. Il a un fils qui veut le mettre dans une maison de retraite. Elle est infirmière à domicile et elle tient tête à ce vieillard bougon car elle le comprend. Ce sont deux révoltés qui vont apprendre à se connaître, s’apprivoiser, faire tomber les masques. Il ne veut pas finir dans un mouroir et elle refuse d’admettre la mort de son enfant dont la chambre est intacte, avec ses rideaux bleus et ses mobiles, sa pile de layette jamais portée.

Ce film touche le spectateur car les deux thématiques de la fin et du commencement de la vie sont traitées en parallèle. Dans notre société vieillissante qui nous promet une espérance de vie de plus en plus longue, quid de la perspective de se retrouver dans une maison de retraite ? Quid de l’accompagnement des personnes âgées ? Une séquence montrant des vieillards comme dans une salle d’attente fait froid dans le dos. Pourtant, les réalisatrices n’ont eu qu’à filmer ce qu’elles voyaient dans une vraie maison de retraite, sans effet de mise en scène. Le spectateur est renvoyé à sa hantise de finir comme ces êtres en attente et à sa propre mort. C’est pourquoi, le personnage de rebelle d’Edmond à un côté réconfortant. Il prouve qu’il est possible de résister. Restait à trouver la personne sachant respecter son individualité et son intégrité ; moment fort lorsque Rose lui met sur les oreilles le casque d’un baladeur pour qu’il puisse écouter de la musique. Car, pour Edmond, ne restent que des photos souvenirs, ses plantes à arroser et la musique.

La petite chambre joue par petites touches, sur des riens, des gestes, des regards, le choix d’une couleur de pantoufle, le sourire de Rose, un album photo aux pages soudain blanches… Et une fin de film dont il faut garder le secret. Film très joliment réalisé et qui ménage de beaux moments d’émotion, il serait dommage qu’il soit d’abord le support de débats sur notre société.

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