Critiques de films

Image du film Les Chatouilles
Photo Andréa Bescond — © Stéphanie Branchu, Les Films du Kiosque
Les Chatouilles
un film réalisé par Andréa Bescond et Éric Métayer

Leur pièce, Les Chatouilles ou la Danse de la colère, a beaucoup fait parler avec de nombreux prix dont le Molière du seul en scène 2016 ; spectacle autobiographique radical à la mesure de son sujet : le viol d’une enfant et comment celle-ci grandit et se reconstruit grâce à la danse et à une analyse. Andréa Bescond a séduit les producteurs du film par sa performance. Ils ont eu la bonne idée d’en confier aux deux auteurs la réalisation, avec Andréa Bescond dans son même rôle.

Odette porte le nom de la princesse du Lac des Cygnes. Prénom prédestiné ? La danse est sa passion. Elle a 8 ans et s’y consacre corps et âme … corps surtout, ce corps qu’elle peut s’approprier dans cette discipline car, par ailleurs, il y a mainmise sur lui. Ses parents aiment beaucoup leur ami Gilbert Miguié à qui tout réussit. Il a une très jolie femme et deux beaux garçons. Professionnellement, tout va bien pour lui. Comment Odette pourrait-elle leur dire que Miguié la viole régulièrement au risque de leur faire du mal ? Ce secret, c’est à une psy qu’elle le racontera plus tard, devenue adulte. Ce cheminement vers la résilience, qui se poursuit sur une vingtaine d’années, est interprété sur scène par Andréa Bescond qui joue tous les personnages. Passer au cinéma revenait à leur donner un corps et à explorer les dommages collatéraux de ce drame et les thèmes de la responsabilité, de la culpabilité, de l’impossibilité à construire une vie amoureuse, sans décevoir les spectateurs qui ont aimé la pièce. Le casting est parfait : Cyrille Mairesse, dans le rôle d’Odette enfant, est émouvante par sa sensibilité et sa tristesse à fleur de peau, face à Karin Viard et Clovis Cornillac, parents terriblement aveugles de ce qui se passe sous leur propre toit, Pierre Deladonchamps campe un pervers pédophile loin des clichés, et Carole Franck est une psy dont le registre de réactions face au récit d’Odette est inventif et souvent drôle.

Car, tout comme la pièce, le film n’est pas plombé « On voulait garder une forme de poésie et d’humour, avec de vraies bouffées d’oxygène. Et la danse amenait ça. Grâce notamment à l’introduction des comédies musicales, on sortait de moments pénibles et on respirait. » La mise en scène construite sur des strates temporelles mêlant le passé au présent, dans un même plan ou une même séquence, avec Odette adulte et l’enfant qu’elle a été, est réjouissante. « C’était un hommage au puzzle de la mémoire traumatique. On voulait assumer le côté ludique et poétique de ces scènes fantasmatiques. » Derrière la fantaisie, difficile d’oublier qu’il s’agit bien de la vie d’Andréa Bescond et le procès final est glaçant. Dans la réalité, c’est parce qu’elle a porté plainte qu’il a eu lieu, la prescription ayant protégé jusque-là son agresseur des crimes commis sur d’autres victimes. Il ouvre sur la question de la Justice et des lois à mettre en place concernant les violences sexuelles faites aux mineurs, quand les chiffres sont affolants : 154 000 enfants sont violés chaque année en France et pour la plupart par des proches de la famille quand il ne s’agit pas d’inceste. Les Chatouilles est un film politique et d’utilité publique dont on ne sort pas indemne.

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