Critiques de films

Un balcon sur la mer
un film de Nicole Garcia
Un balcon sur la mer de Nicole Garcia
© Les Productions du Trésor - Europacorp - France 3 Cinema - Pauline's Angel

Les films de Nicole Garcia ne déçoivent jamais. Avec son nouveau film, elle traite d’un sujet qui lui est cher et qu’elle n’avait pas encore abordé en tant qu’auteur : la guerre d’Algérie, précisément, à travers le prisme de la mémoire de l’enfance, diffractée par le temps qui a passé et qui est forcément faussée.

Le film se situe d’emblée dans l’entre deux du rêve et de l’éveil. Le générique se déroule sur la ville d’Oran au petit matin et le film s’ouvre ensuite sur le personnage principal qui s’apprête pour une nouvelle journée. Il est agent immobilier à Nice. Sa vie va basculer avec la rencontre d’une femme, intéressée par l’achat d’une propriété. Il croit reconnaître en elle Cathy, une petite fille dont il était très amoureux, lorsqu’il habitait enfant, en Algérie, avant l’Indépendance.

Ainsi va commence pour Marc une longue quête de sa mémoire pour combler les vides laissés par les non dits… par le silence que ses parents ont fait peser sur ces événements qui les ont conduits à quitter précipitamment Oran. Construit comme un thriller autour d’un suspens et sur des rebondissements, Un balcon sur la mer est un film passionnant à tous égards.

Pourquoi le passé fait-il surface un jour, un appel du passé vers lequel tout renvoie, tout fait sens, et alimente la quête du souvenir ? Marc a-t-il rêvé d’Oran, cette nuit là, avant de rencontrer cette jeune femme qui lui rappelle sa petite amoureuse ? Peut-être n’aurait-il pas fait cette confusion à un autre moment de sa vie. Il est prêt, désormais ; prêt à faire souffler le vent sur les voiles de son bateau, immobile sur la piscine de sa villa, à l’image de sa vie dont le train-train confortable est devenu ennuyeux. Ainsi, s’était-il perdu, comme il le dira à la fin du film, après s’être retrouvé. Revenir sur le lieu de son enfance, à Oran, sur la terrasse de ses jeux et ses amours enfantins, lui fera recouvrer la mémoire et l’élan vital pour avancer dans la vie.

Avec ce personnage mystérieux de femme, magnifiquement interprété par Marie-Josée Croze, Un balcon sur la mer fera penser à Vertigo. Des séquences de nuit, en voiture, rajoutent à ces références hitchcockiennes où la blonde et la brune sont les deux faces d’un seul et même visage du souvenir, mais qui ne correspond pas à la réalité. Cette réalité se dérobe. Elle est subjective. Lorsque les deux personnages discutent d’un même événement qu’ils ont vécu enfant, pendant la guerre d’Algérie, chacun a sa propre version du passé.

Nicole Garcia a réussi à parler de la complexité de cette guerre qui s’est jouée avec des protagonistes de différents bords ; enseignant communiste indépendantiste, terroriste de l’OAS et ces petites gens qui allaient tout perdre du jour au lendemain et ne plus jamais vouloir en parler à leurs enfants, au risque de les rendre amnésiques. Mais ce silence crée une béance douloureuse que Marc va chercher à combler. Un balcon sur la mer touche au monde de l’enfance dont on voudrait recomposer les éléments. Il y souffle un vent de nostalgie de ce paradis perdu où tout un chacun peut se retrouver ; adulte, éternel exilé de l’enfant qu’il a été. Merveilleux Jean Dujardin que l’on n’attendait pas dans un tel rôle qui joue sur les tourments à vif de l’intériorité. Nicole Garcia a su deviner ce potentiel dramatique du comédien. Assurément, ce rôle marquera un tournant dans sa carrière.

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