Critiques de films

Image du film 3 jours à Quiberon
© Peter Hartwig / Rohfilm Factory / Prokino Filmverleih GmbH
3 jours à Quiberon
Un film d’Emily Atef (7 récompenses au German Film Awards dont Meilleur Film)

Il fallait être à la hauteur du mythe Romy ! En cinémascope et somptueux noir et blanc, avec Marie Baümer dans le rôle de Romy Schneider, Emily Atef signe un portrait à sa mesure, relatant un séjour de la comédienne en cure à Quiberon.

Née au cinéma avec Sissi, ce fut son malheur. L’Allemagne n’a pas pardonné à sa princesse de jouer ensuite des rôles sulfureux. Elle sera traitée de madone et de pute. 3 jours à Quiberon raconte de quelle manière un journaliste du « Stern » a réalisé la dernière interview allemande de Romy Schneider, avec l’excellent Robert Gwisdek dans le rôle de Michæl Jürgs. L’impudeur et l’irrespect avec laquelle il traite l’actrice est glaçante, ne s’émouvant pas de ses larmes, de ses doutes, de l’aveu du sentiment de culpabilité de ne pas être davantage présente pour ses enfants. Mais que l’on ne s’y trompe pas, elle n’est pas une victime ! Marie Baümer impressionne et la ressemblance physique est troublante. Sous le regard d’acier du journaliste et la mitraille du photographe, l’interview est éprouvante. Reste Hilde, son amie attentionnée, personnage essentiel du film, réinventé pour les besoins de la fiction.

Ce séjour en Bretagne eut lieu en 1981, quelques mois avant l’accident de David, le fils de Romy Schneider, et un an avant la mort de la comédienne. Certes, ce film dégage sa propre force, et peut s’apprécier sans rien connaître de cette issue dramatique mais certains propos échangés font froid dans le dos et suscitent l’émotion, quand on sait ce qu’il adviendra. La découverte du fonds de photos, prises par le grand photographe allemand Robert Lebeck, lors de ce séjour, et mis à sa disposition, a nourri le désir de la réalisatrice de faire ce film, avec ses quelques centaines de clichés où elle a découvert une femme sans filtre et non une star. Comme dans ses films précédents, Emily Atef voulait parler d’une femme, « une femme quel que soit son âge, qui traverse une crise existentielle, prise entre ses démons intérieurs et son envie de vivre ». Décédé en 2014, Lebeck n’a pu voir le film achevé. C’est regrettable. Il l’aurait sans doute aimé. De nombreux plans correspondent à ses photos. La trame narrative de 3 jours à Quiberon a été construite sur cette base. Dans un bar de Quiberon, Romy danse au bras d’un poète excentrique (brève mais mémorable prestation de Denis Lavant), court sur les rochers au risque de se casser une cheville – ce qui lui arrive – l’obligeant à garder le lit pour son plus grand bonheur et celui de sa petite Sarah, sa fille. A voir les clichés originaux qui ont inspiré cette séquence, rarement Romy Schneider ne paraît si sereine. Emily Atef témoigne de la femme lumineuse que fut Romy Schneider pour briser avec la tragédie qui lui colle à la peau. Amoureux, Robert Lubeck photographiait à s’étourdir Romy Schneider, et à la façon dont elle s’abandonne, on mesure la joie qu’elle ressentait. Son cinéma irradie ce bonheur. Elle n’aurait pas pu vivre autrement qu’en étant comédienne et aimée par la caméra.

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