Critiques de films

Image du film Frantz
Photo Paula Beer, Pierre Niney © Mars Films
Frantz
un film de François Ozon

Nous étonnant toujours par la variété de sa filmographie, François Ozon récidive avec Frantz qui se passe au lendemain de la guerre 14-18, un film en noir et blanc, traversé parfois par la couleur. Il s’agit de l’adaptation d’une pièce de Maurice Rostand que Lubitsch avait déjà revisitée au cinéma avec Broken Lullaby, en 1931. Ozon s’est réapproprié cette histoire. Il l’a enrichie et en a varié le point de vue, nous offrant un film grave et romanesque placé sous le thème de la vérité et du mensonge.

Frantz, jeune Allemand, a péri sur le front, pendant la guerre. Ses parents sont inconsolables, ainsi qu’Anna, sa fiancée. Un jeune Français, venu exprès en Allemagne, au risque de subir la haine des villageois qui ont tous perdu un proche dans cette guerre qui vient de s’achever, se recueille sur sa tombe, dévasté par le chagrin. Anna et les parents de Frantz vont apprendre à le connaître, à faire le deuil de la mort de leur cher disparu et reprendre goût à la vie. Lorsqu’il repart en France, Anna fera à son tour le voyage, telle une héroïne truffaldienne, pour quitter son ennuyeuse province allemande, échapper à un mariage qui semble être son seul avenir possible avec un homme peu aimable, retrouver Adrien et embrasser sa destinée.

Mais Adrien cache un lourd secret et le film d’Ozon est passionnant car il progresse sur cette énigme. Pierre Niney est parfait dans le rôle d’Adrien, sachant exprimer chagrin et désarroi d’un mouvement de sourcil, d’un regard, face à Anna, Paula Beer (à l’interprétation toute de nuances), fiancée devenue veuve d’un mariage jamais consommé. C’est du point de vue de la jeune femme que le film se construit et son imaginaire se nourrit des récits d’Adrien évoquant Paris et ses musées, son opéra, les poètes français. C’est aussi le point de vue des Allemands humiliés par le traité de Versailles, celui des perdants de la guerre, qu’Ozon a voulu adopter, dans ce pays qui verra naître un nationalisme puissant. Le film pose la question de la vérité et du mensonge en jouant sur des séquences en flash-backs qui offrent à l’interprétation de nombreuses pistes. Jusqu’à la fin, le spectateur est surpris par des rebondissements inattendus et par l’évolution des personnages, notamment celle d’Anna, l’une des plus belles figures féminines du cinéma d’Ozon. Elle est une héroïne à sa manière, au lendemain de cette guerre qui vit les débuts de l’émancipation des femmes. Comment gagner la liberté ? Telle est l’une des voies explorées par le film. Rêver sa vie, la réinventer, s’arranger avec le mensonge. En ce sens, ami spectateur, ne révélez pas le secret d’Adrien…

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