Critiques de films

Rentrée cinématographique 2013 à Strasbourg

Incontournables rendez-vous des cinéphiles strasbourgeois, Ciné Cool et le Festival du Film Fantastique marquent l’entrée dans un automne précoce dont le crachin et la froidure ne donnent qu’une envie, aller au cinéma. Ciné Cool, fin août, a donné un avant-goût de films qui sont sortis, ou sortiront bientôt, et le FEFFS confirme avec sa 6e édition qu’il est le lieu privilégié pour des films que l’on ne verra nulle part ailleurs en salle.

Ciné Cool, du 24 au 31 août fut l’occasion de retrouver François Dupeyron au mieux de son talent. Mon âme par toi guérie est un film porté par la grâce. Son sujet et ses interprètes y sont remarquables : Grégory Gadebois et Céline Sallette que tout oppose jouent une partition amoureuse sur le fil, avec autour d’eux Jean-Pierre Darroussin, Marie Payen ou encore l’étonnant Philippe Rebbot découvert dans Mariage à Mendoza. Frédi a hérité de sa mère, qui vient de décéder, le don de guérir. Que faire de ce don ? Comment l’accepter ? Quelles en sont les limites ? Et c’est la rencontre de Nina qui fut l’égérie d’un peintre… Modèle à la dérive, noyant sa mélancolie dans le champagne. Rencontre de deux âmes à fleur de peau et très beau film sorti le 25 septembre.

Ilo Ilo fut l’occasion de rencontrer le premier réalisateur taiwanais à emporter la Caméra d’Or à Cannes, en 2013. Anthony Chen a signé un film largement autobiographique où il évoque son enfance au sein d’une famille touchée de plein fouet par la crise de 1990. Il traite du sort particulier des philippines employées comme bonnes — esclavagisme d’aujourd’hui qui fait froid dans le dos. Ce film est un document intéressant sur une société mal connue en Europe.

Dans le registre de la comédie, Tip Top est un film atypique avec un couple de flics de choc incarné par Isabelle Huppert et Sandrine Kiberlain. Loufoque et grinçant, déconcertant certes !

Dans un esprit Tintin mixé d’Indiana Jones, Les Conquérants, sorti le 25 septembre, est un plaisir pour le spectateur. Le film est nourri de références liées à la fameuse quête du Saint Graal dans laquelle sont entraînés deux frères bien différents qui vont devoir s’entendre pour mener à bien leur mission… au cœur des montagnes basques. Denis Podalydès prouve, une fois de plus, son vrai talent comique et Mathieu Demy campe son petit frère râleur avec beaucoup d’humour. C’est truffé de gags ; un divertissement très sympathique.

Image du film 9 mois ferme
9 mois ferme : Photo Albert Dupontel, Sandrine Kiberlain — © Wild Bunch Distribution

9 mois ferme, le dernier film d’Albert Dupontel, est une comédie désopilante tandis que son auteur refuse – absolument - de considérer que son film est drôle. Et pourtant ! Il serait vraiment dommage de bouder son plaisir. Sandrine Kiberlain encore, y joue une juge célibataire très stricte qui se retrouve enceinte sans savoir de qui. Elle mène l’enquête et son géniteur s’avère être un terrible psychopathe globophage (comprenez qui mange les globes oculaires !). Albert Dupontel est cet horrible individu dont parlent tous les journaux télévisés donnant lieu à des caméos de comédiens inattendus, et pas des moindres. C’est irrésistible et réalisé avec une belle maîtrise : le meilleur film de Dupontel !

Le Festival Européen du Film Fantastique de Strasbourg en est à sa 6e édition et s’est déroulé du 13 au 22 septembre 2013 aux cinémas Star, Star Saint-Exupéry et Vox. Une cinquantaine de longs métrages était visible ainsi que des courts métrages, sans compter des documentaires. Les jeux vidéos étaient à l’honneur cette année – une première dans ce Festival. La Zombie Walk a été perturbée par les trombes d’eau qui se sont abattues sur Strasbourg, ce samedi 14 septembre, mais ce rassemblement de zombies et autres créatures infernales à vous glacer les sangs, reste un moment festif et une curiosité. C’est fou les effets spéciaux possibles qu’offre le maquillage ! Pour les cinéphiles, impossible d’avoir pu manquer la projection, salle de l’Aubette, de L’Étudiant de Prague, ce chef d’œuvre du cinéma expressionniste, réalisé en 1926.

Image du film App
© App

Et résolument contemporain, il y eut App ! App est le premier film pour lequel il faut laisser allumer son téléphone portable pendant la projection, et pour cause, puisqu’il faut y entrer une application qui permet de voir le film en double écran. Bobby Boermans, le jeune réalisateur de ce film qui marquera assurément un pas dans l’histoire du cinéma, a été également l’auteur, en 2011, du premier film à voir exclusivement en ligne : Claustrofobia. Passé par des écoles de cinéma et de montage aux Pays-Bas d’où il est originaire, puis aux Etats-Unis, Bobby Boermans ne fait pas des films comme simples prétextes à exploiter les nouvelles technologies. App est un film très bien scénarisé qui joue avec les codes du cinéma fantastique classique et il ménage un vrai suspens tout à fait réussi. Il est question de fantômes vengeurs, d’objets animés, de cette volonté de pouvoir qui rend fou et de savant qui joue à l’apprenti sorcier. Le secret est au cœur de l’intrigue également et la contagion. Ici, l’application Iris se propage à tous les autres appareils tel un virus maléfique dont il est impossible de se débarrasser au risque de mourir. S’il est possible d’apprécier absolument ce film sans le support d’un second écran, avoir son smartphone allumé en même temps que l’on regarde le film, est une nouvelle expérience cinématographique intéressante qui joue sur le savoir spectatoriel en divulguant des informations auxquelles le spectateur lambda n’accédera qu’ultérieurement. Ce film, qui est non seulement une réussite mais qui innove, n’a pas trouvé cependant de distributeur pour les salles de cinéma en France. Ce n’est pas le cas pour les Allemands et les Japonais. Hollywood en a carrément acheté les droits pour un remake. Cela est étonnant et fait la preuve d’une frilosité hexagonale regrettable. Dans le cadre du FEFFS, la majorité des films en compétition n’ont pas de distributeur. C’est l’occasion pour les spectateurs strasbourgeois de se faire plaisir. Rendez-vous est d’ores et déjà pris pour l’année prochaine !

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